L’année 2023 a été jalonnée par les déplacements forcés de la population à cause des activités des gangs armés.

Des milliers de personnes ont dû quitter leurs domiciles et fuir vers un ailleurs incertain afin d’échapper à la violence résultant de l’insécurité. Toutefois, n’ayant aucun autre endroit où aller, certains sont restés, y compris des femmes et des petites filles. Coup d’œil sur leur situation dans ces zones à haut risque.

Pour ces femmes, habiter dans des quartiers occupés par les gangs armés est très difficile au quotidien. Pour Marlène, une jeune femme de 23 ans qui vit dans la commune de Croix-des-Bouquets, une menace non négligeable réside dans l’intérêt qu’un membre de gang pourrait avoir pour elle : « Les bandits font la loi dans la zone, alors quand l’un d’eux, nous fait des avances, on se doit de réagir avec prudence car nos vies peuvent être en danger. On est obligé de bien choisir nos mots car une mauvaise interprétation de leur part peut nous être fatale ».

Quant à Jeanne, jeune femme de 28 ans qui habite le bas Delmas, ce qui l’effraie le plus ce sont les agressions dont les filles de la zone sont victimes : « [Les bandits] se promènent dans le quartier avec des armes de guerre sous le bras. Ils prennent un malin plaisir à harceler et à agresser les filles qui passent, même des mineures. Dans ces cas-là, nous ne pouvons pas les repousser car ils sont les maîtres et seigneurs par ici« .

Si pour ces femmes cohabiter avec les bandits est un véritable calvaire, arriver à satisfaire leurs besoins de première nécessité en est un autre. Jeanne, mère de trois enfants qui possédait une petite boutique sur le quartier, explique cette réalité : »Quand les gangs ont commencé à envahir la zone, les activités économiques ont baissé petit à petit, jusqu’à être réduites à néant une fois que les bandits ont pris le contrôle de la ville. Maintenant, nous avons beaucoup de difficultés à trouver de quoi manger et boire. Ma famille et moi dépendons totalement des transferts venant de l’étranger, sans compter que même cela ne suffit pas à nous nourrir convenablement”.

Magda, qui habite également à Croix-des-Bouquets, fait état d’une autre situation tout aussi dangereuse : « Pour avoir un minimum de revenu, nous sommes obligés de faire des allers-retours. Parfois, les policiers que l’on croise sur les grands axes routiers peuvent penser que nous sommes complices des bandits, ils nous réservent parfois des traitements violents et dénigrants alors qu’en réalité nous sommes les véritables victimes ». Cette jeune femme, qui a à peine dix-neuf ans et qui vient de terminer ses études classiques, se plaint également d’un manque d’accès à l’eau potable car les compagnies qui avaient l’habitude d’approvisionner la zone ont maintenant peur de s’y aventurer. Pour maintenir une hygiène corporelle et intime satisfaisante, elle se retrouve obligée d’utiliser de l’eau dont la qualité et la propreté laissent à désirer. Acheter régulièrement des serviettes pendant ses menstruations est également très compliqué, par manque d’argent elle a déjà eu recours à l’utilisation de morceaux de tissu en guise de substitut.

Malgré tout cela, aucune volonté de la part des autorités étatiques pour éradiquer l’insécurité ne semble être manifestée. Livrées à elles-mêmes, ces femmes qui habitent les zones occupées par les groupes de gangs n’ont aucun sauveur vers qui se tourner. À croire qu’une solution à la crise est loin d’être trouvée.

N.B : Par souci d’anonymat et de sécurité, les prénoms des interviewées ont été remplacé.

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